Le-Bonheur-des-Mots

Le-Bonheur-des-Mots

Vision (Adeline)

J’étais chez moi, assis à la fenêtre, je contemplais au loin une jeune femme étendue sur les rochers à la forme rectangulaire de la plage. Je jouais à lancer une pièce dans les airs, comme si je tentais un pile ou face avec moi-même. Las de la pollution assurée par la vie et la société, je m’allongeais et me laissais aller … J’avais oublié mon téléphone. Impossible que l’on me dérange. Ce téléphone, poison de la recherche d’un plaisir que l’on ne connaitra jamais comme celui que l’on a connu enfant. Car le trésor se trouve en soi et non, dans ce portable qui empêche si souvent l’être aimé de me comprendre. L’être aimé qui risque de s’inquiéter …
A force de jouer avec ma pièce, aïe ! Celle-ci me cogna le front. Je cessais de jouer et m’assoupissais. Alors que dehors, le brouillard commençait à se lever. Dans ma tête, tout se chamboula, tout se mit à tourner…
Dans mon rêve, je m’approchais de cette femme, sur les rochers ronds et humides. Elle s’était collée au rocher. A mesure que je m’avançais, je voyais sa peau recouverte de petits points. Avait-elle la chair de poule ? Sûrement avait-elle froid. Sa peau semblait recouverte d’une étrange matière en petits pointillés. J’aurais voulu glisser ma main dans un gant en plastique et la toucher. Découvrant sa peau, je m’aperçus qu’elle était nue. Celle-ci s’étira, son corps était beau, oui, c’était une belle femme. Elle était allongée, sensuelle, offerte au soleil, à la vie, offerte à demain. Ses cheveux emmêlés tombaient sur ses épaules. La découverte de son corps me criait de la regarder mais sa nudité me disait de m’échapper. Malgré la richesse de ses formes généreuses, elle avait l’air d’être légère comme une plume. Ses rondeurs semblaient être celles d’une femme enceinte. M’approchant un peu plus près, plusieurs choses m’apparurent : d’abord la plasticité de sa peau, semblable à celle d’une peau de bébé, elle avait l’air douce, comme la mienne dans mes souvenirs d’enfance ; Puis l’apparence fragile que celle-ci dégageait ; Enfin, elle semblait être comme froide au toucher. Dormait-elle ? Pleurait-elle ? Qu’en sais-je ? Cependant, beaucoup de choses en elle faisaient écho à mon enfance et éveillaient en moi une sensation de gourmandise. Pour résumer cette impression, ces souvenirs d’enfance m’obligeaient à faire un retour sur moi. Un retour impossible à réfréner.
Lorsque j’émergeais de ce sommeil rêveur, je ne me souvenais plus très bien de ce corps. Etait-elle belle ou était-ce une affreuse sirène. Quand j’y repensais, je revoyais la beauté mais un sentiment de dégoût, une certaine répugnance restaient ancrés, peut-être sa nudité ? Peut-être que secrètement j’aurais aimé être le prince charmant qui du haut des roues de sa diligence de carrosse l’aurait arraché à ce rocher et à sa possible tristesse ?
Ce songe, doux et bienveillant m’avait apporté une sensation reposante. Alors que les gens d’aujourd’hui éprouvent le besoin d’être rapides, j’avais réussi à me croire dans les bruitages d’un film muet.
Il ne me restait, alors, pour ne pas vraiment revenir à la réalité et rester dans ce demi-sommeil si protecteur de la vie, qu’à jeter mon sachet de courses qi me ramenait fatalement à notre société et sa consommation.



07/11/2016
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